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Posté : 20 nov. 2003, 21:10:00
par McPeter
<TABLE BORDER=0 ALIGN=CENTER WIDTH=85%><TR><TD><font size=-1><b>Citation :</b></font></TD></TR></TABLE><TABLE BORDER=1 CELLPADDING=10 BORDERCOLOR=#FF0000 ALIGN=CENTER WIDTH=85%><TR BGCOLOR=#F3F2F4><TD><FONT SIZE=-1>L'avant goà»t (amer) d'une justice privée sur le web
Communiqué de la coopérative Ouvaton

Jeudi 6 novembre, un huissier a transmis à  notre coopérative le courrier
d'un cabinet d'avocats. Ce pli nous menace de poursuites, au nom de la
société Métrobus, si nous ne bloquons pas immédiatement l'accès à  l'un des
sites hébergés : celui du collectif ayant appelé à  des actions
anti-publicités dans le métro parisien. Cet événement est à  rapprocher
d'une démarche similaire conduite il y a quelques jours à  l'encontre du
<a href="mailto:R@S">R@S</a>, un autre hébergeur indépendant, à  propos d'un site syndical. On
remarquera qu'Ouvaton et le <a href="mailto:R@S">R@S</a> sont les deux hébergeurs qui, aux cà´tés
d'IRIS, de la Ligue des Droits de l'Homme et de l'union syndicale-G10
solidaire, ont été les premiers signataires de la pétition contre une
disposition du projet de Loi sur l'Economie Numérique (LEN) qui, si elle
était votée, modifierait substantiellement le régime de responsabilité des
hébergeurs de sites web.

La législation actuelle requiert qu'un hébergeur se doit de tenir à  la
disposition de la justice les coordonnées fournies par ses clients, ainsi
qu'un certain nombre d'indications techniques. Il ne peut être condamné que
s'il a manqué à  son obligation de recueil d'identité et de conservation des
identifiants de connexion, et bien entendu s'il n'obtempère pas à  une
demande judiciaire de suppression de contenu. La loi en vigueur entérine le
fait que l'hébergeur est un simple intermédiaire technique. Il ne peut pas
être poursuivi pour les contenus éditoriaux des pages qu'il stocke sur ses
serveurs dans le cadre de la vente de services d'hébergement, comme un
propriétaire ne pourrait être poursuivi pour des fautes commises par un de
ses locataires. C'est la raison pour laquelle ni Ouvaton ni le <a href="mailto:R@S">R@S</a> n'ont
donné suite aux demandes des avocats en avance d'une loi.

En effet, le projet gouvernemental qui va être examiné prochainement en
seconde lecture à  l'Assemblée Nationale prévoit d'assigner aux hébergeurs
un rà´le bien différent. Ceux-ci seraient mis en cause s'ils n'ont pas agi "
avec promptitude " pour rendre impossible l'accès à  des données dont ils "
ont eu la connaissance effective [du] caractère illicite, ou de faits et
circonstances faisant apparaître ce caractère illicite ". La loi en
gestation demande donc que les hébergeurs statuent sur le caractère licite
ou non de contenus qui leur seraient signalés? par n'importe qui.

Qu'on ne s'y trompe pas. Il n'est pas question ici de gagner en efficacité
pour lutter contre la pédophilie ou la circulation d'idées vénéneuses, le
droit tel qu'il est, fait très bien l'affaire et les jugements en référé
peuvent faire cesser immédiatement les troubles à  l'ordre public.

La coopérative Ouvaton existe depuis trois ans, elle héberge 3500 sites.
Nous avons été sollicités à  trois reprises par la justice pour fournir des
éléments d'authentification, mais aucune demande de fermeture de site n'a
été formulée. Par ailleurs, l'initiative de Métrobus est la seconde
tentative d'intimidation que nous subissons. On voit donc que les "
plaintes " sont peu nombreuses : le projet contenu dans la LEN n'est pas là 
pour alléger le travail des tribunaux et des brigades de gendarmerie. Au
contraire même.

Ajoutons à  l'observation du nombre une étude rapide de la nature des
plaintes : un élu mécontent de ce que disent de lui les opposants d'un
projet de plateforme multimodale de transport, des bisbilles associatives
entre anciens dirigeants qui dégénèrent sur la place publique, un maire
malmené dans un forum de discussion du site d'un de ses administrés? On
comprend immédiatement qu'une évaluation de la plainte par l'hébergeur est
impossible. Si la République forme et rémunère policiers et magistrats,
c'est à  l'évidence que la détermination de ce qui est légal ou non n'est
pas chose facile. Quelle que soit l'attitude de l'hébergeur forcé de dire
le droit sans en avoir les réelles compétences, il risquera une plainte de
l'une ou l'autre des parties. La LEN va multiplier les conflits.

Les avocats s'en plaindront moins que les juges. Nul ne s'étonne alors
qu'ils trépignent d'impatience à  ce qu'elle soit mise en ?uvre et lancent
ici ou là  des ballons d'essai, y compris vers ceux qui parmi les hébergeurs
adoptent une position stricte de refus du rà´le que les députés et sénateurs
semblent vouloir leur attribuer.

Pourquoi souhaiter que chaque hébergeur se transforme en enquêteur de
police, juge d'instruction et tribunal à  la fois, et ainsi mettre en place
une justice privée forcément expéditive ? Pourquoi créer un espace oà¹
régnera la loi du plus fort, la loi du plus riche, de celui à  la voix la
plus menaà§ante ? Est-ce pour favoriser le développement de la confiance
numérique et faciliter le commerce, ou pour permettre de museler le web,
outil d'expression directe des citoyens ?

Les quelques centaines de milliers de Franà§ais qui gèrent un site web ne
peuvent accepter une loi qui les placerait à  la merci du premier courrier
recommandé adressé à  leur hébergeur. Les hébergeurs ne peuvent prendre le
risque d'une loi qui les logeraient entre le marteau et l'enclume. La
liberté d'expression, le respect des personnes, les droits sur la propriété
intellectuelle sont trop important pour que l'on décide, dès lors qu'on est
sur le web, de ne plus les faire appliquer par les structures communes dont
notre société s'est dotée. Rencontrons nos élus afin de leur expliquer en
quoi ils s'apprêtent à  voter une disposition inutile et dangereuse. Il faut
modifier ce projet de loi, il en est encore temps.

Yann Forget

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